En
Mathématiques, les
conjectures de Weil, qui sont devenues des théorèmes en
1974, ont été des propositions très influentes à la fin des années 40 énoncées par
André Weil sur les fonctions génératrices (connues sous le nom de fonctions zêta locales) déduites du décompte de nombre de points des variétés algébriques sur les
corps finis.
Une variété V sur un corps fini à q éléments possède un nombre fini de points sur le corps lui-même, et sur chaque corps fini à q k éléments contenant ce corps. La fonction génératrice possède des coefficients dérivés des nombres N k de points sur le corps (essentiellement unique) à q k éléments.
La tâche principale était que ces fonctions zêta devaient être des fonctions rationnelles, devant satisfaire une forme d'équation fonctionnelle, et devaient avoir leurs zéros dans des endroits restreints. Les deux dernières parties étaient tout à fait consciemment modelisées sur la fonction zêta de Riemann et l'hypothèse de Riemann.
Arrière-plan et histoire
En fait, le cas des
courbes sur les corps finis à été démontré par Weil lui-même, achevant le projet démarré par le théorème de Hasse sur les courbes elliptiques sur les corps finis. Les conjectures étaient suffisamment naturelles dans une direction, simplement en proposant que les bonnes propriétés connues seraient étendues. Leur intérêt était suffisamment évident dans la
Théorie des nombres : elles impliquaient l'existence d'un mécanisme qui fournirait les limites supérieures pour les sommes exponentielles, un élément de base dans la théorie analytique des nombres.
Ce que était réellement attirant, à partir du point de vue d'autres domaines mathématiques, était la connexion proposée avec la topologie algébrique. Etant donné que les corps finis sont discrets par nature, et que la topologie parle seulement du continu, la formulation détaillée de Weil (basée sur l'élaboration de quelques exemples) était frappante et novatrice. Il suggérait que la géométrie sur les corps finis devait s'ajuster dans des motifs bien connus se reliant aux nombres de Betti, au théorème du point fixé de Lefschetz et ainsi de suite.
Weil lui-même n'essaya jamais sérieusement de démontrer les conjectures. L'analogie avec la topologie suggérait que la nouvelle théorie homologique serait conçue en s'appliquant dans la géométrie algébrique. Ceci prit deux décennies (ce fut l'objectif central du travail et de l'école d'Alexander Grothendieck) pour l'élaborer sur les suggestions initiales de Serre et d'autres. La partie rationnelle des conjectures fut démontrée d'abord, par Bernard Dwork en 1960, en utilisant les méthodes p-adiques. Le reste attendit la construction de la cohomologie étale, une théorie dont la définition est relativement profonde. Les démonstrations furent complétées par Pierre Deligne en 1974, en utilisant un argument d'induction sur la dimension, en parlant grossièrement.
Les conjectures de Weil ont, par conséquent, pris leurs places dans la théorie générale (des fonctions L, au sens large). Puisque la cohomologie étale possède plusieurs autres applications, ce développement donne des exemples entre les conjectures (basées sur les exemples et l'intuition), la construction de la théorie, la résolution de problème, et d'avantages inattendus, même dans les parties les plus abstraites des mathématiques pures.
Enoncé des conjectures de Weil
Supposons que
X soit une variété algébrique projective non-singulière à
n dimensions sur le corps
Fq à
q éléments. La
fonction zêta ζ(X, s) de
X est définie par
ζ(X, s) = exp | ( | ∞ Σ m = 1 | N m ––– m | (q - s ) m) |
où N m est le nombre de points de X défini sur le corps d'ordre q m .
Les conjectures de Weil énoncent que :
- ζ(X, s) est une fonction rationnelle de T = q - s . Plus précisément : ζ(X, s) = Π P i (q - s ) ( - 1 ) i + 1 où chaque P i (T) est un polynôme de la forme Π (1- α i,j T) (Rationalité).
- ζ(X, s) = ζ(X, n-s) , ou de manière équivalente, l'application prenant α vers q n / α prend les nombres α i,j vers les nombres α 2n-i,j . (Équation fonctionnelle ou dualité de Poincaré).
- : Ceci est l'analogue de l'hypothèse de Riemann et est la partie la plus difficile des conjectures. Ceci peut être reformulé en disant que tous les zéros de P i (q - s ) se placent sur la "droite critique" des nombres s de partie réelle i/2.
- Si X est la "réduction mod p" d'une variété projective complexe non-singulière Y, alors le degré de P i est le i-ème nombre de Betti de Y.
Exemples
La droite projective
L'exemple le plus simple (autre qu'un point) consiste à prendre
X comme étant la droite projective. Le nombre de points de
X sur un corps fini à
q m éléments est simplement
N m = q m + 1 (où le "+ 1" provient du "point à l'infini"). La fonction zêta est simplement
1/(1 - q - s )(1-q 1 - s ) . Il est facile de vérifier toutes les parties des conjectures de Weil directement.
L'espace projectif
Il n'est pas plus difficile de prendre un espace projectif à
n dimensions. Le nombre de points de
X sur un corps à
q m éléments est simplement
N m = 1 + q m + q 2m + … + q nm . La fonction zêta est simplement
1/(1-q - s )(1-q 1 - s )(1-q 2 - s )...(1-q n-s ) .
Il est de nouveau facile de vérifier toutes les parties des conjectures de Weil directement.
La raison pour laquelle la droite projective et l'espace projectif étaient si faciles est qu'ils peuvent être écrits comme des unions disjointes d'un nombre fini de copies d'espaces affines, qui produisent le nombre de points sur eux particulièrement facile à calculer. Il est aussi facile de démontrer les conjectures de Weil pour d'autres espaces, tels que les Grassmanniens, qui ont la même propriété.
Les courbes elliptiques
Celles-ci donnent les premiers cas non-triviaux des conjectures de Weil (démontrés par Hasse). Si
E est une courbe elliptique sur un corps fini à
q éléments, alors le nombre de points de
E défini sur le corps à
q m éléments est
1 - α m - β m + q m , où
α et
β sont des conjugués complexes de valeur absolue
. La fonction zêta est
ζ(E,s) = (1 - α q - s )(1 - β q - s ) / (1 - q - s )(1-q 1 - s )
La cohomologie de Weil
Weil suggéra que les conjectures découlaient de l'existence d'une "théorie cohomologique de Weil" appropriée pour les variétés sur les corps finis, similaire à la cohomologie usuelle avec des coefficients rationnels pour les variétés complexes. Son idée était que si
F est l'automorphisme de Frobenius sur le corps fini, alors le nombre de points de la variété
X sur le corps d'ordre
q m est le nombre de points fixés de
F m (agissant sur tous les points de la variété
X définis sur la clôture algébrique). En topologie algébrique, le nombre de points fixés d'un automorphisme peut être établi en utilisant le théorème du point fixé de Lefschetz, donnant une somme alternée des traces sur les groupes cohomologiques. Donc, s'il existait des groupes cohomologiques similaires pour les variétés sur les corps finis, alors la fonction zêta pourrait être exprimé en termes de ceux-ci.
Le premier problème avec ceci est que le corps de coefficient pour une théorie cohomologique de Weil ne peut pas être le corps des nombres rationnels. Pour voir ceci, considérons le cas d'une Courbe elliptique supersingulière sur un corps fini de caractéristique p. L'anneau d'endomorphisme de ceci est une algèbre de quaternion sur les rationnels, et agirait sur le premier groupe cohomologique, qui serait un espace vectoriel à 2 dimension sur le corps de coefficient par analogie avec le cas d'une courbe elliptique complexe. Néanmoins, une algèbre de quaternion sur les rationnels de peut pas agir avec un espace vectoriel à deux dimensions sur les rationnels. Le même argument élimine la possibilité que le corps de coefficient soit le corps des réels ou les nombres p-adiques, parce que l'algèbre de quaternion est encore une algèbre de division sur ces corps. Néanmoins, il n'élimine pas la possibilité que le corps de coefficient soit le corps des nombres l-adiques pour quelques nombres premiers l≠p, parce que sur ces corps l'algèbre de division se sépare et devient une algèbre matricielle, qui peut agir sur un espace vectoriel à 2 dimensions. Grothendieck et Michael Artin sont parvenus à construire des théorie cohomologiques appropriées sur le corps des nombres l-adiques pour chaque nombre premier l≠p, appelée cohomologie l-adique.
Références
- Weil, André Numbers of solutions of equations in finite fields. Bull. Amer. Math. Soc. 55, (1949). 497--508. Reprinted in OEuvres Scientifiques/Collected Papers by Andre Weil ISBN 0-387-90330-5
- Deligne, Pierre La conjecture de Weil. I. Inst. Hautes Études Sci. Publ. Math. No. 43 (1974), 273--307. La conjecture de Weil : II. Publications Mathématiques de l'IHÉS, 52 (1980), p. 137-252
- Freitag, Eberhard; Kiehl, Reinhardt Étale cohomology and the Weil conjecture. Ergebnisse der Mathematik und ihrer Grenzgebiete (3) , 13. Springer-Verlag, Berlin, 1988. ISBN 0-387-12175-7
- Katz, Nicholas M. An overview of Deligne's work on Hilbert's twenty-first problem. Mathematical developments arising from Hilbert problems (Proc. Sympos. Pure Math., Vol. XXVIII, Northern Illinois Univ., De Kalb, Ill., 1974), pp. 537--557. Amer. Math. Soc., Providence, R. I., 1976.